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  • Marie-Anne Lorgé

Les imprévisibles

Au printemps, pour tromper l’inquiétude, on chantait au balcon. Aujourd’hui, on danse.


Telle est l’initiative du TROIS CL, qui met en place une formule aussi originale qu’irrésistible de spectacle vivant, à savoir: un tête-à-tête avec un.e artiste chorégraphe, sans savoir au préalable ce que vous allez découvrir. Baptisé1 + 1, ce format garant d’une expérience sensorielle inédite, le TROIS C-L le propose le 3 février, soit dans ses locaux de la Banannefabrik, soit dans votre salon (via la plateforme zoom). Je vous explique comment ça marche.



Ils sont douze, douze danseurs/danseuses et chorégraphes à se prêter au jeu. Perméables aux replis, pertes de repères ou de sens et autres manques décuplés par le contexte sanitaire, mais parfois aussi/plutôt inspirés par les perspectives lumineuses que sont le rêve, l’enfance, voire l’utopie (et si on quittait la planète!), ces artistes fourbissent des petites créations de 30 minutes, qu’ils vous livrent en toute intimité.


Ce format, initié par le TROIS C-L (Centre de Création Chorégraphique Luxembourgeois), unique au Luxembourg, est celui d’un moment privilégié dont les bienfaits sont gigognes, s’agissant de sensibiliser à la danse contemporaine, de la ressentir autrement et de renforcer les liens entre les spectateur.rice.s et les artistes, auxquels est ainsi offerte l’occasion d’enfin (ou d’encore) travailler, avec une grande liberté d’expérimentation, ce qui traduit la détermination du TROIS C-L à défendre la place et l’importance de l’artiste dans nos sociétés, tout en réinventant des façons de respecter tous les protocoles de sécurité en vigueur.


Ce moment privilégié, de partage humain et de création artistique, on l’imaginerait bien transposable aux comédiens et aux musiciens, le temps d’un monologue, d’un conte, d’un concert privatifs…


En attendant, grâce au TROIS C-L, l’imprévisible est de mise. Certes, les artistes sont connus, mais rien de ce qui vous attend. Sauf une date: le 3 février.

Partant de là, deux possibilités: soit live, à la Banannefabrik (12, rue du Puits, Luxembourg-Bonnevoie) – six artistes chorégraphes y investissent différents espaces et chacun propose une création adaptée au lieu choisi et en fonction d’un objet particulier (je vais y revenir) –, soit vous optez pour la représentation à distance, à vivre dans votre salon, via Zoom – en ce cas, six autres artistes s’y collent, avec une création tout aussi exclusive.


Concrètement, quid du mode d’emploi? Dans les deux cas, il vous faut réserver un ou plusieurs créneaux horaires d’une demi-heure.


A la Banannefabrik, les créneaux se situent entre 12.30 et 14.00h et/ou 18.30 et 21.00h. Vous vous présentez seul(e), 10 minutes avant l’heure dite, vous choisissez parmi six objets, tous reliés à une création – celui qui vous attire le plus –, puis, vous êtes convié(e) à suivre l’artiste à qui appartient l’objet, vers le lieu correspondant, où vous découvrez sa performance en tête-à-tête.

Pour la formule online (toujours le 3 février, n’est-ce pas !), vous avez la même possibilité de réserver un ou plusieurs créneaux d’une demi-heure, mais entre 14.00 et 16.45h et/ou 18.00 et 20.45h; une fois le choix fait, vous vous connectez via le lien envoyé au préalable, 5 minutes avant le début de votre créneau. A défaut d’objet à choisir, une création vous est aléatoirement attribuée. Clairement, c’est le TROIS C-L, au fur et à mesure des réservations, «qui met un artiste et un spectateur ensemble, sans que ledit spectateur ne sache rien de rien jusqu’à la dernière minute».


Mathématiquement parlant, le TROIS C-L table sur «8 spectateurs par artiste, ce qui fait potentiellement 96 spectateurs, sachant que chacun – celui/celle qui désire consacrer toute une journée entière à l’aventure – peut voir jusqu’à 9 spectacles (maximum) ».

Complet et fabuleux challenge que ce 1 +1 d’abord programmé en décembre avec 6 créateurs, puis reporté en janvier, pour finalement aboutir en février avec «deux modules, live et online, et l’ajout de 6 artistes, ce, grâce à un nouveau partenaire, l’Œuvre Nationale de Secours Grande-Duchesse Charlotte». Et donc, «enfin clôturer un projet qui traîne depuis quatre mois», dit Bernard Baumgarten, directeur artistique du TROIS C-L: «après, soit nous allons faire un nouveau projet, soit nous pourrons rouvrir la maison».


En tout cas, ce 1 + 1 est un florilège de propositions très différentes et d’artistes aux univers opposés.


Alors, qui et quoi?


Dans la version LIVE, il y a Sarah Baltzinger, qui propose May you lie down with me, «un parcours frénétique dans un espace restreint dans la perspective d’illustrer le besoin de l’autre». Et il y a William Cardoso qui, lui, propose Dear mum, «un voyage au plus profond de soi-même, là où il y a peu de couleur, là où seules les pensées résonnent». Et il y a Anne-Mareike Hess avec Our eyes, une performance directement inspirée du contact humain que cette année n’a pas célébré, avec focus sur l’importance du regard et l'émotion qui peut y naître.


De son côté, plantée dans sa cuisine, devenue espace de liberté et de divertissement pendant le confinement, Rhiannon Morgan fomente #The DanceCubator, «un menu aussi original que pétillant». Quant à Simone Mousset, guidée par l’instant T et ses vibrations, elle improvise: Just getting up and seeing what happens, c’est «sa réaction par rapport à une année où tout ce qui a été planifié est chamboulé». Et jouant sur l’obscurité, Annick Schadeck explore notre corps, ou «comment se glisser dans la peau de quelqu’un d’autre», dans In your eyes».


Dans le module ONLINE, il est davantage encore question de peau, «de danse à découvrir sous un angle plus intime que sur scène». En compagnie de Ioanna Anousaki, qui chasse les ombres dans The shade of my own ou «comment notre ombre peut-elle devenir notre plus grande peur et en même temps, notre seule alliée?». En compagnie aussi de Jill Crovisier, qui propose Die Gastgeberin: «c’est une pièce de danse qui plonge dans le monde absurde et imaginaire d’une dame nommée Mademoiselle Magdalena, qui, confrontée à une absence éminente de ses invités, retombe dans ses souvenirs d’enfance et commence à jouer une scène de dîner».


Tania Soubry, qui travaille le mouvement, le texte, le dialogue et la musique (voix, chant et son), «s’intéresse à un réenchantement poétique du monde par la sensualité, l’humour, la solidarité» et son Down to Earth est une fable d’après Brexit: toute l’île décolle et quitte la planète Terre et c’est un jeu de 4 cartes vous aurez le choix entre trois couleurs menant à une conversation spécifique et à une danse différente qui déterminera le retour ou non sur Terre.

Le Rest in Peace de Léa Tirabasso, «une courte pièce autobiographique représentant à la fois l’officiant et le cadavre de ce qu’a été 2020 en terme de scènes avortées, de dates annulées, et d’opportunités manquées», est conçu comme un rituel, «pour les danses oubliées et les danses à venir. Une excuse pour danser ensemble».


Sinon, il y a aussi Valerie Reding avec m.a.d. about you. Et Isaiah Wilson, un artiste interdisciplinaire (arts plastiques et arts du spectacle) qui «examine de plus près les instincts de survie, la cruauté et la complexité tout en restant fidèle à la simplicité», du coup, Passenger raconte son histoire personnelle, qui se passe dans son garage: alors que le public est invité à une balade nocturne en voiture, «le conducteur reçoit un inquiétant appel téléphonique qui l’amène peu à peu à perdre le contact avec la réalité».


Photo: Léa Tirabasso © Bohumil Kostohryz


Infos: www.danse.lu. Réserv. tél.: 40.45.69 ou mail: danse@danse.lu

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