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  • Marie-Anne Lorgé

Cousu de fil blanc

Le décembre de mon enfance, c’est tout blanc – ce blanc dont René Char se demande où il va quand la neige fond.


Le décembre d’alors, c’était le cartable qui servait de traîneau.


Quant au Noël, dans mon souvenir, c’est une odeur. Celle du cougnou, cette brioche dorée en forme de Jésus, boutonnée au ventre par des perles de sucre.


C’est aussi une boîte à musique, qui se remontait une fois secouée comme une boule à neige. Dont l’origine date, paraît-il, de l’Expo universelle de 1878 à Paris; les maîtres-verriers y étaient à l’honneur. En tout cas, ce n’est pas d’abord le Père Noël qui a été emprisonné dans la sphère emplie d’eau où voletait une poudre blanche, mais la tour Eiffel (en 1889); pour ce qui est du verre, il a été terrassé par le plastique dans les années 50.


Sinon, hier, il y avait les cartes postales, souvent décorées de rouges-gorges, de cheminées fumantes aussi.


Et puis, il y avait les cheveux d’ange, qui emmaillotaient le sapin comme une barbe à papa – le sapin, c’était celui qui perdait ses aiguilles, tout enguirlandé d’ampoules aussi droites que des bougies, tout paré de ces boules à pendre qui cassaient entre le pouce et l’index, tout scintillant d’étoiles fabriquées en papier doré, tout accoutré de ces fils dont on fait les histoires.



Et le fil de l’actuelle histoire, c’est celui que tire Ruben Montini, un artiste italien fondu de couture, au point d’initier un projet itinérant de broderie collective, un projet qui depuis 2016 voyage à travers plusieurs pays d’Europe et auquel chacun est invité à participer librement (voir photo), sans rien connaître du point tige ou du point de bouclette.


A chaque étape du parcours européen – et ces 12 et 13 décembre, c’est au Casino Luxembourg-Forum d’art contemporain que le parcours fait escale –, un fil reste lâche afin que les participants des escales suivantes puissent continuer à broder, à modifier et interpréter à leur manière ce qui a été entamé par leurs prédécesseurs. C’est ce qui s’appelle broder une histoire. Et qui prouve finalement que tout – rencontres et partage y compris – ne tient qu’à un fil.


Avis aux mains raconteuses, afin de ne pas perdre le fil, il s’agit bien sûr de s’inscrire: vistes@casino-luxembourg.lu. La participation est gratuite.

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