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Circulez, on crée

  • Marie-Anne Lorgé
  • 12 nov.
  • 6 min de lecture

Le phare de la semaine, c’est le design. En quatre jours d’un festival qui met les petits plats dans les grands pour nous démontrer à quel point le design fait partie de notre culture et de notre économie. Selon le programme (lire ci-dessous), si vous n’avez toujours pas compris que le design luxembourgeois est particulièrement dynamique, c’est que vous le faites exprès.


Mais avant…


Au large des champs plus très verts et des arbres plutôt roux, pelotonnés dans une écharpe de brouillard, une maison.


Et de la buée aux carreaux. Précisément, à cette vitre qui sépare deux oiseaux et où se pose la buée de leur respiration (visuel ci-dessous: Breathing Bird), un instant d’éternité, d’une beauté inouïe, fabriqué par David Claerbout, vidéaste majeur de sa génération, dont l’œuvre, entre photographie et cinéma, actuellement accueillie à la Konschthal Esch, réussit à rendre palpable la durée, nous invitant à expérimenter une intimité du temps et ça ne se boude sous aucun prétexte.


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Sinon, la maison peut être celle de Laurent Mauvignier qui a décroché le Prix Goncourt (2025) pour cette histoire de Maison vide depuis 1976 mais peuplée des récits de Marguerite, sa grand-mère, de Marie-Ernestine, la mère de celle-ci, et de tous les hommes qui ont gravité autour d’elles, toutes et tous progressivement effacés, et que l’auteur ramène à la lumière par l’écriture.

Touchée par les ombres de cette maison dont la destinée faisait écho à celle de ma famille, je vous avais touché un mot de cet éblouissant roman qui réveille la mémoire des murs et des objets, ce, en été, donc bien avant que s’emballe l’automne des prix littéraires, embrayant un calendrier marketing précis qui, par le pouvoir hypnotique du bandeau rouge, nous conduit aux cadeaux de Noël.


De quoi vous rappeler que les bibliothèques sont là pour offrir une visibilité aux livres… qui n’en ont pas.


Et vous signaler quand même au chapitre primé, au cas où cela vous aurait échappé, qu’Emmanuel Carrère a remporté le Médicis avec Kolkhoze, qu’Adélaïde de Clermont-Tonnerre écope du Renaudot pour Je voulais vivre où elle revisite le personnage de Milady de Winter, antagoniste des Trois Mousquetaires d’Alexandre Dumas, que le Femina échoit à Nathacha Appanah et que le discret Prix de Flore revient à Rebeka Warrior, figure emblématique de la scène électro-punk et queer française, pour Toutes les vies, un premier roman sur l'amour sublime, le deuil impossible et la quête spirituelle, prix qui lui vaut c’est la tradition du Flore de déguster du Pouilly-fumé chaque jour pendant un an… Et finalement, s’abandonner à la lecture, dans un coin de canapé, en sirotant un verre une tasse de café/thé/chocolat fait aussi l‘affaire , c’est le bon plan de saison.


Dans la gamme des lauriers, mais en arts visuels, et made in Luxembourg, notez que le Prix Grand-Duc Adolphe, décerné lors du Salon du CAL toujours accessible au Tramsschapp (Limperstberg) jusqu’au 16 novembre a été attribué à Chantal Maquet. 


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Le bon plan avant la déferlante qui s’annonce, nommé Luxembourg Art Week et Biennale De Mains de Maîtres, entre autres réjouissances, dont aussi le festival Rainy Days, qui, avec le thème Corps sonores et sonorités corporelles, décide de saisir à bras-le-corps le cliché d’une musique actuelle qui serait complètement cérébrale, ce, du 19 au 23 novembre, à la Philharmonie of course, donc, le bon  plan dis-je, c’est d’apprivoiser l’univers surréaliste du photographe alchimiste Michel Medinger, qui nous a quittés le 14 janvier 2025.


Et pour ça, direction Dudelange, on descend au Pomhouse (ancien bâtiment jouxtant le château d’eau), là où L’ordre des choses, expo présentée en 2024 aux Rencontres d’Arles, dans la chapelle de la Charité à l’initiative de Lët’z Arles est actuellement réactivée, adaptée à la configuration du lieu.


Concrètement, d’abord deux monumentaux cabinets de curiosités, où cohabitent bibelots, poupées en plastique, vieux outils ou objets étranges, squelettes d’oiseaux et autres crânes, une collection fabuleuse (visuel ci-dessus), fidèle au rituel d’accumulation du fantasque «lord of things» que fut Michel Medinger, et puis, au centre de ces tabernacles ouverts à l’imaginaire dadaïste, des cimaises closes en un carré où s’aligne une sélection de tirages révélant l’inventivité et le perfectionnisme de l’artiste.

 

Inventivité technique  expérimentation de chimies personnelles, revisitation de principes anciens,  cyanotype, Cibachrome,  platinotype, solarisation, transfert Polaroïd et virages au sélénium et à l'uranium inclus une inventivité échancrée dans la scénographie de L’ordre des choses qui s’autorise l’ajout de caissons lumineux géants…

 

Et inventivité dans les associations incongrues d’objets détournés, de fruits ou légumes anthropomorphes, tous acteurs de mises en scène aussi soigneuses qu’improbables, toutes à l’origine d’images où la mort côtoie l’érotisme et vice versa.

Dans ces relectures de la nature morte inspirée des vanités des maîtres passés, les fleurs fanées sont devenues emblématiques de l’oeuvre de Michel Medinger, comme autant d’allégories de la fragilité et la beauté de l’existence.

 

Michel Medinger n’a eu de cesse de déplacer son regard, de le placer amusé sur la condition humaine, et nous convier au spectacle de la vie.


Et ça non plus, ça ne se boude sous aucun prétexte. Jusqu’au 30 novembre, entrée libre du mercredi au dimanche de 12.00 à 18.00h


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Sinon, la grosse actu de cette semaine, hormis les Walfer Bicherdeeg, le Salon du livre de Walferdange qui se tient au Centre Prince Henri les 15 et 16 novembre, c’est, roulement de tambours, le Luxembourg Design Festival.


Une première édition du genre, organisée par l’asbl Design Luxembourg, qui, du 12 au 16 novembre, investit une douzaine de lieux culturels de la capitale, à commencer par le LUCA (Luxembourg Center for Architecture, sis à la Tour Jacob), promu quartier général, où a lieu la conférence inaugurale (ce 12/11, à 17.00h), où seront décernés des awards (les Luxembourg Design Awards mettant à l’honneur les talents et la créativité de la scène nationale) le 13/11 à 18.00h et où un marché des créateurs, piloté par le collectif Augenschmaus, se développe le 16/11, entrée libre de 11.00 à 18.00h.


Mais tout n’est pas dit, loin s’en faut. Le Design Festival embrasse une dense programmation internationale et pluridisciplinaire truffée de conférences ouvertes au public lors de la Conférence Night le 14/11 (au LUCA), de 18.00 à 22.15h, tablez notamment sur la présence de Sylvain Boyer, le créateur  de l’identité visuelle des JO 2024 et de workshops sur le motion design, sur l’IA et la 3D, sur les défis professionnels des designers, et là, un conseil, scrutez les infos sur www.designfestival.lu  


Au rang des ateliers, notez e.a celui de linogravure de Charles Vinz le 15/11 (14.00h) au Lëtzebuerg City Museum, et celui, culinaire, d’Alice Malaret qui met en lumière le food design lors de «Cooking classes» les 14 et 15/11 aux restaurants First Floor, Equilibrium et Alegria.


Et puis, il y a des expos. A savoir Panorama (visuel ci-dessus), We Want et Infiiorata.


Panorama, expo déjà en cours à la rue de Strasbourg (au n°62, ancien café EGG), présente une panoplie de produits (bijoux, chaises, lampes...) de la scène design locale, une grande variété d’approches alliant héritage, expérimentation et innovation attestant de l’audace d’une discipline en mouvement. 20 œuvres en tout, de 21 designers (Christophe de la Fontaine, Anne-Marie Herckes, Lucie Majerus e.a.) et 5 jeunes talents du Lycée des Arts et Métiers, chacun apportant sa vision singulière du design contemporain, en cette expo collective curatée par Julie Conrad et Ruth Lorang, toutes deux lauréates 2025 de la bourse prototypage, qui, avec Georges Zigrand, également lauréat 2025, présentent parallèlement leurs projets de recherche au LUCA du 13/11 (vernissage à 16.30h) au 16/11.


Parlant de la bourse prototypage – au demeurant initiée par Kultur | lx - Arts Council Luxembourg notez que les lauréat.e.s 2026 sont Sara Noel Costa de Araujo, Mike Fritsch (en collaboration avec Anthea Caddy & Marcin Pietruszewski), et Juliane Morel.


Quant à We Want, c’est une structure mobile en extérieur (au coin blvrd Dr Charles Marx et rue Jean-Baptiste Merkels, Hollerich-Gare) qui met à l’honneur le design graphique et le design produit des deux départements design du Lycée des Arts et Métiers (vernissage le 15/11, à 19.00h).


Enfin, Infiiorata, c’est une expo florale proposée par/chez Creutz & Friends (au 22 rue du Marché-aux-Herbes) qui remet en question les notions conventionnelles de l’art foral et élargit les possibilités de la botanique contemporaine (jusqu’en décembre).


Pour compléter le tableau, j’ajoute Grande Liberté, une expo de Dante - Goods and Bads/ Aylin Langreuter et Christophe de la Fontaine à la galerie Liberté (21 Av. de la Liberté), ainsi que Consciousness, expo de Benoît Theunissen, artiste et photographe surréaliste belge, à la galerie Subtile (au 21A, Av. Gaston Diderich à Belair).


Ce qui ne nous dispense pas d’aussi pousser notre curiosité au Casino Display, histoire (les 15 et 16/11) de découvrir la risographie, le travail de Hannes Brischke, artiste en résidence.


Et puisqu’un festival, c’est aussi faire la fête, il y a une Designers’ Party aux Rotondes, le samedi 15/11, de 21.00 à 03.00h des DJ sets sont prévus jusqu’au bout de la nuit.


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Et parce que l’info risque de passer à la trappe dans la déferlante annoncée, je tiens à vous conduire la Kufa (Kulturfabrik Esch), là où la Compagnie J’ai pas fait exprès sera en résidence pour travailler son spectacle La Manivelle (visuel ci-dessus). Entre théâtre, performance et art sonore, le projet explore la mémoire à travers les voix, les sons et les silences, transformant une archive radiophonique en expérience immersive.


Et c’est pour partager le fruit de ce travail, nous donner un aperçu de la création en cours, en l’occurrence mise en scène par Joël Delsaut, qu’une sortie de résidence ouverte au public aura lieu le vendredi 28 novembre, à 18.00h.

Entrée libre… sur inscription: inscriptions@kulturfabrik.lu

 
 
 

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