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Carnet de campagne

  • Marie-Anne Lorgé
  • 17 juil.
  • 13 min de lecture

Dernière mise à jour : il y a 11 minutes

Au soleil du Midi…

Dans le décor, tout est à sa place: l’azur, l’air chaud, les cigales, les platanes, les affiches, les marchands de glaces, la cohue, les pieds surchauffés…


A Arles, festival de photographie de renommée internationale, c’est comme ça chaque été depuis 1970.


Et chaque été, à Avignon, berceau de la plus importante manifestation de spectacle vivant du monde créée en1947 par Jean Vilar, et dont l’actuelle 79e édition est pilotée par Tiago Rodrigues, même ébullition… autour du Palais des papes, de la place de l’Horloge, des gymnases, cloîtres, chapelles, jardins, carrières, églises et autres garages convertis en scènes, désormais pléthoriques 1.700 spectacles dans le Off, 42 dans le In avec son incurable lot de polémiques, d’émotions, d’engagements aussi.


Dans ce sud festivalier, je vous propose (ci-dessous) une brève incursion en 3 lieux (le fabuleux palais de Luppé, la chapelle de la Charité où Perdre le nord et La Madeleine)…


… en me promettant de rebondir tout prochainement sur le voyage immobile qu’il n’y a pas lieu de bouder au pays, dont à la Konschthal Esch – là, en 4 nouveaux «Project Rooms», Julien Hübsch & Jeremy Palluce se confrontent à l’urbanité, pendant que Claudia Passeri & Letizia Romanini y parlent nature (je vous le dis tout net, ça mérite amplement le détour) –, et au MNAHA (Nationalmusée um Fëschmaart) à Luxembourg, où l’expo chorale Land in Motion. Transforming People and Nature propose un regard transversal sur l’évolution des paysages et l’empreinte humaine au fil des siècles, ce, au travers d’œuvres archéologiques, historiques et artistiques (notamment de Justine Blau, Claudia Passeri, Su-Mei Tse, Serge Ecker, Marco Godinho e.a. pièces appartenant à la collection du musée), noyées dans une scénographie riche mais un tantinet encombrée, voire kitsch.


Dans le sillage «nature», et afin de nourrir encore ou autrement votre regard, notez que l’estivale expo de la Photothèque de la Ville de Luxembourg, intitulée pour la cause Nature, captured and framed – et réunissant plus de 100 photographies réalisées entre 1900 et 2014 par une quinzaine de photographes, dont Batty Fischer, Pol Aschman, Tony Krier ou encore Marcel Schroeder – a pris ses quartiers au Cercle Cité (espace du Ratskeller), où elle reste accessible jusqu’au 14 septembre (du lundi au dimanche, de 11.00 à 19.00h). 



Avant de filer plein sud, juste une halte, parfaitement réjouissante (je vous l’avais d’ailleurs promise dans mon précédent post), sur le site de Montauban-Buzenol, là, au bout d’un autre sud, celui du Luxembourg belge – je vous cause souvent de ce havre magique, perfusé par la mémoire des arbres et des hommes –, là, précisément, où se niche un Centre d’art contemporain (CACLB) sans façade ni enseigne, dévolu aux résonances entre l’art et le vivant.


Sans enseigne, certes. Pour autant, le CACLB comprend 2 structures d’expo. Celle, patrimoniale, de l’ancien Bureau des forges, petit bâti blanc où, pour l’heure, Adrien Degioanni capture un silence étonnamment sonore, et celle, visionnaire, constitué d’un assemblage de containers maritimes vitrés superposés, baptisé Espace René Greisch, dont un étage est envahi par la délicate création de Mélanie Berger, perméable à la luminosité et à l’humidité de sorte que l’huile et les pigments modifient leur mélange.


Adrien Degioanni creuse le silence dans ce qu’il a de plus dense et d’immédiat lors de nos absences. Concrètement, dans le grenier du Bureau des forges, soustrait de tout bruit, l’artiste enregistre et amplifie ce qui échappe à l’oreille humaine, soit: un silence… fait de bruits enfouis, comme si le lieu libérait la parole de fantômes improbables. Le visiteur fait ainsi l’expérience d’un palimpseste acoustique qui brouille les repères spatio-temporels.


Le silence n’est donc jamais absolu, et l’espace toujours habité. Quid alors de l’absence? C’est cette dimension qu’Adrien éprouve en récupérant des fragments de miroirs sales jetés en rue, les accumulant, les installant artistiquement au mur ou au sol, pour enfin les revaloriser par… la gravure. C’est que, de fait, sur chacun de ces fragments, circule gravé, répété à l’envi, le mot absence. Et au final, les miroirs de continuer leur fonction: sauver des reflets.


Quant à Mélanie Berger, elle s’intéresse au moment de l’apparition de l’image, sensible aux chatoiements de la lumière, lesquels oxydent ses papiers superposés. Donc, la lumière agit, l’image naît ou s’affadit, tout un sublime jeu d’apparitions-disparitions (visuel ci-dessus), qui incube avec et selon le temps, jusqu’à ce que, à la fin de l’expo, advienne une transmutation en une vie inédite, avec des dessins augmentés par la présence du soleil.


Au dernier étage de l’Espace René Greisch, Laura Colmenares Guerra suspend le temps en traduisant une seconde d’écoulement du ruisseau proche en une animation numérique.


Et tout n’est pas dit. Il y a aussi l’espace extérieur, à savoir: l’étang et les ruines de la halle à charbon témoignant de l’activité métallurgique de jadis: c’est le terrain de jeu de Charlotte Gigan et Martin Duchêne (alias Studio Biskt) qui déclinent des séries d’objets singuliers en céramique, des éléments rectilignes néanmoins inspirés du végétal, à l’exemple des oiseaux de paradis, ces fleurs somptueusement colorées ici pastichées, puis des bancs, des sièges de balançoires et surtout des arches (au demeurant déjà remarquées dans le parcours des sculptures organisé par Luxembourg Art Week en novembre dernier), une alliance du manuel et du mécanique, de l’art et du design, une conversion de l’état mou à la solidité cuite, à l’image d’une nature pétrifiée au cœur d’un écosystème fragile.


Et tout ce petit monde compose Arkhè, terme grec signifiant à la fois commencement et fondement, et titre de l’expo du Centre d’art contemporain du Luxembourg belge où se tisse un dialogue entre matières, formes et temporalités. Jusqu’au 24 août, entrée libre du mardi au dimanche de 14.00 à 18.00h. Infos: www.caclb.be


Sur le même site de Montauban, notez le concert de Roxane Métayer, qui mêle arts plastiques et musique, en s’inspirant de la faune et de la flore pour créer des paysages sonores enregistrements captés dans des environnements naturels, les forêts surtout où se croisent violon, instruments à vent et voix: un projet immersif qui explore la communication inter-espèces à travers la bioacoustique. Ça se passe le 20 juillet, à 15.00h, accès libre.



Le thermomètre grimpe, en gare d’Arles.

Et qui dit Arles, dit Rencontres photographiques. Avec, c’est l’événement de cette 56e édition,  la consécration de la photographe américaine Nan Godin, lauréate du «Women in Motion» 2025, prix remis dans le Théâtre antique le 8 juillet, en ouverture des Rencontres, moment choisi par l’artiste activiste et révoltée pour projeter des images du territoire palestinien ravagé par le conflit mené par Israël et appeler à l’action.  


On recroise Nan Goldin dans l’église Saint-Blaise où elle propose une relecture du célèbre syndrome de Stendhal, lequel désigne ce moment vertigineux où la beauté, dans toute son intensité, peut mener à l’évanouissement. Et donc Syndrome de Stendhal l’expo, se présente sous la forme d’un diaporama mettant en regard des images de chefs-d’oeuvre de l’art classique, de la Renaissance et du baroque – photographies réalisées dans les musées du monde entier au cours de ces 20 dernières années – avec des portraits des proches et des amours de Nan Goldin. On se laisse surprendre jusqu’au 5 octobre (de 09.30 à 9.30h).


Sinon, c’est l’heure de la promenade en 3 lieux: une demeure néo-florentine – le palais de Luppé –, une chapelle – celle de la Charité, écrin de l’inouïe enquête numérique de Carine Krecké plongée dans le conflit syrien –, et un mas baptisé La Madeleine.


Découverte du palais de Luppé à la faveur de Au bord de l’aube, titre donné à une rencontre professionnelle autour des univers singuliers et axes de recherche de 18 photographes (12 émergents proposés par 6 confirmés) belges et luxembourgeois – en l’occurrence: Justine Blau, Bruno Oliviera, Neckel Scholtus, Giulia Thinnes, Jeannine Unsen, Annick Wolfers, ce, à l’initiative de Kultur | lx – Arts Council Luxembourg ,  chacune/chacun débarquant avec son portfolio, point de départ d’un processus d’écoute et de révélation. Une initiative féconde, où tout le monde a joué le jeu…

 

Et tout ce petit monde conversait/échangeait dans les jardins dudit palais de Luppé, qualifié de «Villa Médicis d’Arles». Une réputation amplement méritée pour cet ancien hôtel particulier du XVIIe siècle, ancré face aux arènes, racheté incendié, en tout cas en ruines, en 1905 par Gaston de Luppé, un jeune sculpteur gascon formé à Toulouse, fasciné par la Renaissance italienne, et surtout par la particulière lumière arlésienne, qui a donc transformé l’édifice en un palais néo-florentin florentin, y créant l’atelier de ses rêves, et y accueillant une constellation d’artistes talentueux – dont Leo Lelée, devenu le peintre des Arlésiennes –, comme on le dit aujourd’hui d’une résidence d’artiste(s).


Pour son aspect architectural, pour son vécu – Gaston de Luppé (décédé en 1939) y partageait son quotidien et son artistique passion avec son épouse, peintre et musicienne , le lieu, où le temps s’est arrêté, mais donc lieu à la fois de vie, de création (visuel ci-dessus) et de collection – eh oui, dans l’actuelle expo Le Sortilège du Midi, des œuvres notamment de Victor Ségoffin et Jean-Amédée Gibert témoignent à la fois de l’aura de mécène de Gaston de Luppé, d’une effervescence artistique ranimée et du trouble perpétuel couvé par un Sud magnétique , le lieu, dis-je, vaut assurément le déplacement.


Où, parallèlement, vibre une expo temporaire dédiée à un artiste luxembourgeois, Adolphe Deville (1935-2022). Un hommage en quatre mosaïques et une dizaine de tableaux. Une façon de rendre son histoire encore vivante, qui perpétue la tradition d’accueil de la maison, d’autant qu’ainsi Deville, qui a créé en Provence, à côté d’Apt, y rejoint tous les amoureux du Sud, d’autant surtout que le peintre travaillait sur les mythes, se les appropriait pour les recracher, un goût pour la mythologie précisément partagé par Gaston de Luppé, qui entretenait avec son palais un lien de feu, notamment lisible à la faveur d’une gigantesque sculpture de Dionysos… qui trône dans le vestibule de cette maison de la démesure. En clair, une énième belle histoire à écrire. En attendant, le palais de Luppé est ouvert à la visite en juillet, août et septembre, tous les jours de 11.00 à 18.00h, ou sur rendez-vous: palaisdeluppe@gmail.com 



Autre lieu de création, et d’hospitalité, celui de La Madeleine, un mas provençal typique datant de 1868 situé rue Henri Dunant, dans le quartier paisible et arboré de Trinquetaille. C’est là que la photographe luxembourgeoise Marie Capesius a bénéficié d’une résidence de recherche en sa qualité de lauréate du Luxembourg Photography Award Mentorship 2025, créé/décerné par Lëtz’Arles. Et lors de la semaine d’inauguration des «Rencontres», Marie a ouvert son studio.


Zoom sur un travail intime, une façon de «faire portrait» sous la forme d’un chemin de/vers soi… qui parle du père par l’ombre, une ombre «peinte» par la lumière, selon le principe du cyanotype. Une image en bleu de Prusse, sur du tissu devenu photosensible – un tissu acheté sur le marché d’Arles, qui rappelle le métier couturier grand-maternel –, où, sous l’effet du soleil, des silhouettes apparaissent et s’évanouissent comme des fantômes.


Un travail intuitif, de l’ordre de la perception, qui – en atteste la création vidéo – transite par la performance, la mise en situation dans/avec la nature, une reconnexion avec les sens, où, partant de linge blanc notamment, s’échappent les métaphores, celles du lien (filial ou nuptial) et du mouvement, lequel dit la fuite du temps. Les restes d’un temps passé mais présent.


Dernier lieu, sur le boulevard des Lices, celui de la chapelle de la Charité, et son décor baroque (visuel ci-dessus), théâtre privilégié de l’association Lët’z Arles qui, depuis 2017, présente une expo photographique aux «Rencontres», rendez-vous estival attendu et prisé, aujourd’hui incarné par Carine Krecké, lauréate du Luxembourg Photography Award 2025dont les singulières méthodes d’investigation s’appuyant sur la cartographie et l’analyse de données en sources ouvertes sont questionnées, voire détournées, dans le cadre de projets qui brouillent les frontières entre réel et fiction, vérité et mensonge.


Carine Krecké explore les liens entre arts visuels et géopolitique. Oui. Mais c’est peu de le dire. Perdre le nord est un monument humaniste, c’est l’onde de choc d’une indignation, le fruit d’une enquête numérique inouïe, un stupéfiant manifeste de résistance contre l’indifférence généralisée face à l’indicible des conflits – en l’occurrence, en Syrie , c‘est le long – six ans durant et douloureux travail d’une artiste déguisée en photo-reporter, qui questionne la fabrication et la manipulation des images inondant le Web. Et qui, dans la restitution finale de son enquête, laquelle documente sans être documentaire, ose une esthétisation ou, plutôt, une distance ni trop analytique, ni trop émotionnelle, mais néanmoins pas neutre de la «monstration» de la violence, invitant le spectateur de l’exposition à se laisser «déboussoler», à sortir de ses certitudes.


En fait, Perdre le nord est tout autre chose qu’une exposition, c’est un «projet qui échappe à toute tentative de définition (…) hybride, mouvant, insaisissable. Et pour politique que soit le projet, son ambition est d’ouvrir le débat, la réflexion. Ce que favorise la scénographique (visuel ci-dessus: photo ©Armand Quetsch CNA): des caissons emboîtés en grappe au cœur de l’édifice religieux, une géométrie noire plantée dans le baroque du culte, des niches agencées comme une cartographie sensible, où des vidéos racontent les parcours de guides locaux de Google Maps venus de bords parfois opposés, pro ou anti Assad. 


Tout commence en 2018, quand Carine tombe par hasard sur une série de photos sur Google Maps montrant la destruction d’Arbin, leur auteur ayant réussi à tromper la censure du système. Ce qui enclenche l’obsession de l’artiste, qui plonge au coeur des forums et des plateformes de tous horizons, qui infiltre les réseaux, s’immisce dans les discussions de ceux qui lui prêtent leurs yeux, recoupe les témoignages et récits depuis son écran d’ordinateur, hypnotisée aussi par les images des caméras satellitaires survolant le territoire du califat où hallucination et réalité se confondent.


Dans Perdre le nord, Carine Krecké revient sur cet univers qui n‘était pas le sien: la guerre en Syrie. Elle déconstruit (et reconstruit) son expérience, nous conviant à une immersion, qui requiert de prendre du temps et… ne laisse personne indemne. Jusqu’au 5 octobre.


Sous le commissariat de Kevin Muhlen, Perdre le nord s'arrimera en 2027 au Casino Luxembourg-Forum d’art contemporain.



On débarque à Avignon. Surchauffe théâtrale: c’est unique, parfois indigeste, mais on en redemande.


Hors polémique(s) de la Cour d’honneur du Palais des papes, je pourrais vous parler de ce plein air sublime qu’est la carrière de Boulbon, là où je garde l’inoxydable souvenir d’un soir de 2009 où la voix de Jeanne Moreau projetait en relief La Guerre des Juifs, un texte de Flavius Josèphe adapté par Amos Gitaï, mais, voilà, je n’ai pas eu l’occasion d’à nouveau arpenter la carrière là où, en ce moment, Anne Teresa de Keersmaeker met en mouvement ce monument qu’est Brel.


Pour autant, je vous propose un autre plein air, plein de charme, à savoir: le jardin de l’ancien Carmel d’Avignon, où la dérision fait langage dans The Great Chevalier, une performance brillamment absurde – une création soutenue par Kultur | lx – Arts Council Luxembourg pour représenter le Grand-Duché au Festival d’Avignon, sachant, pour rappel, que la présence luxembourgeoise en Avignon date de 1999, avec L’annonce faite à Marie de Paul Claudel, dans une mise en scène de Marja-Leena Junker, au Théâtre du balcon.


Voilà, il est 17.00h, Simone Mousset nous accueille, habillée de noir, cheveux gominés, droite comme un I, sourire pro. Ça sent l’imposture (ou la fausse posture), et ce sera le cas, ô combien facétieuse.


Elle nous annonce une rencontre dansée avec le jeune et flamboyant directeur du Ballet National Folklorique du Luxembourg, M. Chevalier – notez que cette rencontre a déjà eu lieu en 2023 lors de la Nuit des Musées au Nationalmusée et en 2024 au Casino Luxembourg. Sauf que ledit ballet – ennemi juré du Ballet du Liechtenstein ( !) – et ses fondatrices, les soeurs Bal, n’ont jamais existé. Pour autant, M. Chevalier, directeur imaginaire, est bel et bien jeune et flamboyant, et c’est un danseur remarquable (Louis Chevalier en chair et en os), qui surgit au centre du jeu aussi espiègle que narcissique, aussi touchant que mégalomane.


Début d’une performance déjantée – parfois désespérée – mais parfaitement virtuose (visuel ci-dessus), dont le clou est une hilarante interprétation (de haut vol !) de ce qui s’avère emblématique du répertoire du BNFL, La danse du pigeon – qui emprunte d’ailleurs ses pas à un classique compliqué, en tours, en sauts et en équilibres périlleux… avant de disparaître comme un ver dans les buissons, enroulé dans un grand tissu imprimé représentant un troupeau de chevaux galopant.


Dans l’entre-deux, M. Chevalier invite le public à faire corps (de ballet) en exécutant par les mains la Danse des herbes et des fleurs.


On rit, on doute, et vice versa. Parodie ou pas? Ça force le trait? Sans doute. Qu’importe, on se détend… et ça n’empêche pas de s’interroger sur le faux dans l’art ou, déjà, sur le «fake» généralisé dans un monde suspicieux du vrai. En fait, pour Simone Mousset, créatrice de mythologies souvent incomplètes et surréalistes, l’enjeu du solo caricatural du ballet fictif questionne la façon dont la danse peut servir un récit national. Et plus largement, comment, par qui et pour quoi les récits collectifs participant à la construction d’une identité, d’un besoin d’appartenance, ou d’un désir de pouvoir, sont-ils inventés, contrôlés et manipulés.


L’art bouscule fréquemment – et depuis longtemps – ces questions, et la danse y souscrit donc par le solo The Great Chevalier, et c’est une performance rare. Ça ne se rate pas, jusqu’au 24 juillet, à 17.00h (relâche le 18 juillet), au Théâtre du Train bleu, jardin de l’ancien Carmel, rue de l’Observance. 


Ce qui ne se rate pas non plus, c’est En Quête, un texte de Fábio Godinho qui met en lumière les histoires humaines derrière les déplacements, les quêtes d’accueil, et les aspirations à une vie meilleure, un théâtre à hauteur d’homme et de corde sensible où se mêlent langues, musiques et cultures diverses (…) tout en célébrant l'espoir, la solidarité et la force des communautés multiculturelles. Au Théâtre Transversal, rue d’Amphoux, jusqu’au 23 juillet, à 19.30h (relâche le 23 juillet). 


Et je termine avec Isabelle Bonillo, incorrigible adepte d’un théâtre nomade, infatigable retricoteuse de textes classiques afin d’en faire résonner l’actualité. La marque de fabrique d’Isabelle, c’est le participatif, une mise en espace circulaire du public, où chacun interagit avec l’histoire et les personnages. En l’occurrence, la cible, c’est Le Misanthrope, d’après Molière, servi en version accélérée mais complète, dans le respect de la langue, les vers.


A chaque personnage Célimène, Alceste, le Misanthrope, amoureux de Célimène, Oronte, homme de pouvoir, amant de Célimène, Acaste, marquis, prétendant de Célimène, Eliante, cousine de Célimène, Arsinoé, amie envieuse de Célimène …. correspond un chapeau, dont Isabelle coiffe tour à tour un spectateur, permutant les rôles au cours de cette création qui tient de la performance aussi drôle qu’explosive. Edifiante aussi, car Isabelle, qui se dépense sans compter, virevoltant d’une chaise à l’autre, nous interpelle, invitant chacun/chacune à jauger la conduite de son personnage, à lui proposer un comportement différent, donc, jouer afin d’ensemble transformer des manières d’être pour que plus personne ne devienne misanthrope.


Douce utopie, authentique petite folie généreuse, magistrale démonstration du pouvoir du théâtre, du moins de ce théâtre inventif et indocile qu’incarne «la» Bonillo.

ça se passe à l’Espace St-Martial (rue Henri Fabre), on y court jusqu’au 26 juillet, chaque jour à 20.35h (relâche le 20 juillet). 

 
 
 

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