Nous sommes au coeur d’un paysage remarquable, celui du Parc naturel de la Haute-Sûre, où, couvé de longue date par la Séibühn Ënsber asbl, surgit «Water Walls», une aventure humaine transformée en une oeuvre d’art totale, à moins que ce soit l’inverse.
La mise à l’eau de «Water Walls» est prévue ce 17 juillet – on croise les doigts au niveau météo –, c’est une première édition qui entend voguer loin, en un événement biennal.
De quoi s’agit-il? C’est un festival multidisciplinaire, à la fois installatoire et performatif et, surtout participatif, ou créateur de liens, qui plus est, scotché comme une moule au pilier de l’économie circulaire, donc, «proche de la philosophie des “3R”: réduire, réutiliser, recycler» – des matériaux de proximité, venus par exemple d’une scierie ou de la Duchfabrik (la draperie) – et qui, du coup, induit une réflexion à la fois sur la production artistique et sur la consommation de la culture, mamelles du nouveau concept de culture circulaire.
Concrètement, ça donne quoi? Autour de 4 barrages (en aval du Grand Barrage), 5 installations artistiques – en l’occurrence de Marco Godinho, Justine Blau, Mad Trix, Serge Ecker & Giacomo Piovan –, toutes (donc) arrimées tant aux enjeux et défis des «3R» qu’aux natural borders, sont et resteront accessibles au grand public jusqu’au 25 septembre. Sauf qu’ainsi tout est loin d’être dit. La spécificité du festival étant aussi d’être infusé par «l’expérience à vivre» plutôt que par «le voir», lesdites installations sont/seront innervées par des performances… musicale, sonore, textile, poétique.
Des performances principalement activées lors de l’ouverture du festival le 17 juillet. Bien sûr, certaines se répèteront, d’autres essaimeront.
Avant de tout vous expliquer par le détail, à vous qui ne pouvez participer à l’ouverture du 17/07, ou qui préférez circuler à l’aise tout en profitant d’une guidance, notez qu’une balade commentée (de 2 heures) est organisée les 24 et 31/07, le 14/08 et le 18/09, en français ou en anglais (aussi en allemand le 31/07), avec départ chaque fois à 16.00h depuis le Naturpark, qui, reliant les installations à travers les différents sites (4 à 5 kms en tout), «vous livrera les secrets des oeuvres, des étapes de réflexion, les opportunités comme les difficultés de l’aventure». C’est gratuit mais sur réservation.
Le radeau conçu par Serge Ecker et Giacomo Piovan – radeau intitulé Floating Pixel et situé sur le Barrage 4 – est un exemple de projet collaboratif. Dès sa construction.
Partant de palettes et de gros bidons (offerts par Ouni), l’idée est de créer un espace flottant… à usages multiples. Pour le public qui, «ressentant l’effet de flottement grâce au mouvement rythmique des vagues», peut «apprécier le paysage impressionnant de la vallée de la Sûre depuis un point de la rivière autrement inaccessible», tout comme pour les artistes (musiciens/acteurs) qui souhaiteraient y prester, abrités… par la voile.
Et justement, quid de la voile? C’est un «toit» pixellisé, une pièce de tissu (merci à la Duchfabrik) dont les pixels sont tirés d'images satellites, colorées avec des pigments naturels… locaux: une végétale coloration précisément générée en atelier(s). Nous y voilà.
Nous voilà donc conviés le 17/07, de 12.00 à 18.00h – au Barrage 4, 1 rue Camping «Im Aal» –, à un atelier de coloration (émulsion faite à partir des pigments de couleur des plantes, baies ou fleurs du coin) et de couture (assemblage des morceaux textiles ainsi colorés), en vue de fabriquer la fameuse toile de Floating Pixel, le radeau étant, lui aussi, le fruit d’un travail collectif (c’est gratuit et sans réservation).
Pour ce qui est de Nénuphars (photo ci-dessus), si le public n’est pas convié à l’élaboration de l’oeuvre, il n’en est pas moins l’acteur de son activation. Quésaco?
Au Barrage 3 – rue du Moulin –, des sculptures circulaires sont déposées à fleur de l’eau: ce sont les Nénuphars du collectif Mad Trix, lauréat du 1er Prix stART-up de l’Oeuvre Grande-Duchesse Charlotte, une installation cinétique et sonore, avec pompes à air associées/alignées sur la rive, et surtout, foncièrement interactive, les spectateurs pouvant à loisir s’improviser chefs d’un orchestre incontrôlable en activant lesdites pompes.
Dans le projet de Marco & Fabio Godinho, il y a aussi une plateforme circulaire entre eau et forêt, d’où jouir d’une vue absolument unique. Et c’est déjà ensorcelant, mais la magie se situe ailleurs, en ce que le même belvédère circulaire sert de porte-voix à des textes intimes et universels.
En fait, un porte-voix existe bel et bien, placé au centre de la structure de bois comme une girouette, sensible au vent, d’où les paroles s’envolent. Au quidam de se l’approprier quand il le veut pour colporter, parler, déclamer, chanter ce qui lui passe par la tête. Genèse.
En amont, en résidence d’écriture, Marco & Fabio ont tricoté des récits inspirés de leurs rencontres avec les habitants de la région. Et ce sont ces «histoires du quotidien en lien avec les éléments naturels», ces fragments de vie que les artistes liront – aux abords du Barrage 5 – comme des chants, des mantras, ce, à l’ouverture du festival, le samedi 17/07 à 14.00h et à 15.30h, ainsi que les 4 et 25 septembre (entrée gratuite sans réservation).
Selon Marco & Fabio, Offrir quelques mots à la rive (titre de leur création performative poétique, exemplaire quant à l’économie de moyens qu’elle met en place), c’est initier un rituel, dans la mesure où les spectateurs sont donc invités à découvrir et à partager le porte-voix afin de faire, eux-mêmes, «une offrande à la rive». Non seulement le projet prend ainsi vie en collectif mais transforme le belvédère en un trait d’union entre espace physique et mental.
Et puis, il y a Ensemencement, un projet qui, ajoutant un supplément d’âme à une couche philosophico-écologique, se compose d’une installation de drapeaux… fertilisés, en écho, par des performances musicales.
Les drapeaux sont confectionnés par Justine Blau, et le programme musical, baptisé Ressac|re, est conçu par Stéphane Ghislain Roussel.
Ornés de dessins cyanotypés, donc bleus, les drapeaux – grandes pièces d’étoffe montées sur mâts de bois – traitent de la pollinisation. Parsemés pour la cause de semences, ils vont au gré du vent, et en migrant, ils ensemencent d’autant tous les lieux durant tout le festival.
Très exactement, il y aura trois étapes de migration, et trois lieux. Tout part du Barrage 2, rue de Lultzhausen, le 17 juillet, pour, dès le 7 août, faire escale sur les berges près du pont, rue de Kaundorf, et enfin, former une sorte de théâtre pluriel au château d'Esch-sur-Sûre dès le 30 août. Accès libre en continu.
A chaque lieu, sur l'espèce de scène délimitée par les drapeaux, une performance, à chaque fois différente, va «replacer le respect du vivant au centre de l’action». Le 17/07, jour d’ouverture, au Barrage 2, à 16.30h, c’est United Instruments of Lucilin qui proposera une autre manière de faire entendre les bruits du silence; le 29 août, près du pont, à 11.00h et à 18.00h, c’est à un dialogue avec les astres auquel invitera la soprano luxembourgeoise Véronique Nosbaum, déambulant dans les sous-bois accompagnée du petit orgue portatif de Cristina Alís Raurich.
Et le 11 septembre, dès 07.00h, c’est la violoncelliste Julie Läderach qui improvisera une aube sonore… au château d'Esch-sur-Sûre, là où l'installation Ensemencement de Justine Blau aura pris la forme d'un chapiteau et où, pour tout conclure, une agora participative penchée sur notre rapport au monde vivant et aux écosystèmes, rêvera à de nouvelles alliances.
Bien loin d'un rassemblement pour initiés, cette agora du 11/09, de 10.00 à 19.00h, sera un moment de débats et d’échanges ouvert à tous – citoyens et citoyennes concernés –, sur réservation.
Enfin, notez que le collectif Lagerkultur et le bureau d’architecte YO studio se réunissent pour mettre en place un festival de musique (électronique) de 2 jours les 17 et 18 juillet, ainsi que les 4 et 5 septembre, avec dancefloor en plein air et site de camping aux abords du lac de la Haute-Sûre (sur la plaine derrière l'Hôtel Bissen, Fond de Heiderscheid).
Pour tout renseignement sur le festival: waterwalls@seibuehn.lu
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