On a donc laissé une chaise vide à table, pour accueillir celui qui ne s’y attendait pas – eh oui, il n’est sans doute pas superflu de rappeler que Noël, ce n’est pas une journée ni une saison mais… un esprit –, pour aussi se souvenir de l’absent.e.
A part ça, la bonne nouvelle, une fois la hotte passée, avec ses grelots et sa consommation sentimentale, c’est le solstice, qui profite de la rotation de la terre pour grignoter la nuit. En clair, la lumière revient. Certes, y a encore du chemin, mais, tranquillement, ça nous conduit vers le printemps.
En attendant, c’est la «trêve des confiseurs», période intimant traditionnellement l’accalmie en politique, sur les marchés boursiers et… sur les terrains de foot – depuis 1874, année de l’instauration de l’appellation, la guerre et la misère en sont à l’évidence exclues. Sinon, donc, jusqu’à l’embrassade sous le gui (le 31/12, à minuit), on met sa paperasserie sous le tapis, on croise les doigts et on se rabat… sur le sucre, qui, selon les experts en la matière, relève à fois du plaisir pur, du rituel et du symbole. Ce n’est donc pas le moment de lésiner sur la ganache – tout pèse-personne au rancart, jusqu’à l’heure des bonnes résolutions.
Ceci étant, entre deux bouchées, ouvrez l’oreille et l’œil.
A l’Escher Theater, le dimanche 1er janvier, à 17.00h, l’édition 2023 du Concert de Nouvel An sillonne l’Amérique du Sud: Gast Waltzing dirige l’orchestre de chambre Estro Armonico avec comme invités, notamment, le percussionniste luxembourgeois Jérôme Goldschmidt et l’un des grands harmonicistes brésiliens de la nouvelle génération, Pablo Fagundes, qui a entre autres joué aux côtés de Toots Thielemans. Le rendez-vous est celui de la bossa nova, de la salsa, du tango, de la samba… et du choro, né au XIXe siècle, aux fondements de l’identité musicale brésilienne et résumant ses origines métisses – africaine, européenne et indigène.
Et puis, si votre réservation n’est pas encore faite, je vous rappelle en deux coups de cuillère à pot Le Bal de Paris, ce spectacle vivant immersif sublimé par la réalité virtuelle auquel Blanca Li vous convie au Grand Théâtre, du 28 décembre au 7 janvier.
Enfin, plus efficace qu’un Alka-Seltzer ou tout autre parade aux excès festifs, voici Dress Code, une plongée dans l’univers complexe du breakdance et de ses rituels montée en neige par le chorégraphe Julien Carlier, ce, le 21 janvier, 19.00h, au 3CL (Centre de Création Chorégraphique Luxembourgeois, à la Banannefabrik, rue du Puits, Bonnevoie).
Et parce qu’elle est étrange et particulièrement expressive, et qu’il ne vous reste que 5 jours pour la découvrir, ne zappez pas l’œuvre peinte et dessinée du jeune artiste luxembourgeois Jim Peiffer, qui s’expose (jusqu’au 31 décembre) à la galerie Reuter-Bausch (14 rue Notre-Dame, Luxembourg) – la galerie Bernard Ceysson, qui l’avait invité en décembre 2019 en special guest dans son hall de Wandhaff, récidive avec une expo personnelle dans son antenne de Saint-Etienne, en mars 2023.
Y a du beau monde dans le grenier formel et mental de Jim, où Bosch croise Basquiat, où Matisse toise De Chirico, où le surréaliste télescope les composantes élémentaires de Supports/Surfaces, où dessins – griffés/lacérés à l’encre ou au stylo bille, tous annotés – et peintures – couches de couleurs, au pastel gras ou à l’acrylique, sur toile, papier, contreplaqué, voire panneau de bois récupéré par exemple de la tête de lit de son enfance – se répandent en accumulations de motifs – en l’occurrence architecturaux, plutôt aveugles – et de figures – surtout féminines, plutôt taboues.
Des figurations et des motifs qui se répètent, obsessionnels (photo ci-dessus, Sans titre, acrylique sur toile, 160 x 120, 2021).
Il y a de la saturation, de la déformation, de l’hybridation, de la greffe, de l’amalgame, du totem ou du portrait torturé – en écho à «la mystérieuse animalité d'anthropoïde solitaire et désolée qui est en chaque homme» selon Bacon –, soit, un univers aussi peu simple à apprivoiser qu’un fil disloqué, comme inspiré du cinéma expressionniste allemand, plus précisément du Un chien andalou de Buñuel, où objets et personnages inattendus surgissant dans le décor, laissent «le spectateur libre de leur attribuer une part de réalité, d'imagination, ou de souvenir».
Il y a de l’incantatoire, il y a de la tragédie, et tout son contraire aussi, avec cette façon de mettre en œuvre la répétition comme une mesure de protection contre les forces du mal. Jim Peiffer, le coloriste, le dessinateur raconteur, Jim le tourmenté crée pour s’arracher à ses terreurs, qui sont aussi les nôtres. En même temps, il y a de l’humour, du fantasque et une théâtralité qui convoque humanité informe et monde primitif revisité. Filez voir, peu de chance de reprendre pied.
Infos: www.reuterbausch.lu
Ah oui, en janvier, c’est Chantal Maquet qui s’installera à la galerie Reuter-Bausch, galerie ravie d’annoncer que l’un de ses «poulains», Julien Hübsch, est lauréat de la résidence pluridisciplinaire de recherche et de création 2023 à la Cité internationale des arts à Paris, pour son projet intitulé murs/origines/remplacements.
Par ailleurs, notez que c’est le Stadtmuseum Simeonstift qui accueillera Prix d'Art Robert Schuman –première plateforme pour la création artistique contemporaine dans la Grande Région – du 11 juin au 20 août 2023. Et que les 4 artistes en lice nommés pour représenter le Luxembourg sont: Tessy Bauer, «attirée par des objets du quotidien», Lisa Kohl, photographe, Anni Mertens, céramiste, ainsi que le peintre Roland Quetsch. Pour la sélection de Metz, Sarrebruck et Trèves, infos: pars.vdl.lu
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