Aux dernières nouvelles, le festival d’Avignon, 75e du nom, aura bien lieu du 5 au 25 juillet, Olivier Py, son directeur, écartant tout report ou annulation, misant en même temps sur la responsabilité du spectateur – testé négatif et vacciné – en prévoyant déjà des jauges réduites mais une hausse des représentations. Dans l’éventail des spectacles, «des utopies, des dystopies et autres visions post-apocalyptiques» – ça ne va pas rigoler –, et une Isabelle Huppert attendue dans la Cour d’honneur du palais des Papes, où La Cerisaie de Tchekhov sera mis en scène par le Portugais Tiago Rodrigues.
En attendant, pour saluer l’actuelle clémence du baromètre (tout météorologique), et quelques jours avant que Pâques ne mette la culture sous cloche (c’est une tradition!), voici une petite escapade qui slalome entre arts vivants et visuels. Le tout mâtiné de littérature.
Tout schuss d’abord sur l’écrivain (et réalisateur) belge Jean-Philippe Toussaint, adepte d’un style minimaliste, à qui l’on doit notamment La salle de bain, Fuir (prix Médicis 2005) ou Nue (2013), mais aussi La disparition du paysage, court récit de 56 pages, récemment adapté pour le théâtre sous la forme d’un monologue, en l’occurrence interprété par Denis Podalydès, aussi malicieux que lunaire, surtout touchant. Et que le TNL (Théâtre National du Luxembourg) accueille les 30 et 31 mars et les 1er avril, dans le contexte du Mois de la francophonie.
Ça se passe face à la mer. Celle du Nord. Devant une fenêtre donnant sur la plage d’Ostende. Ça sent Brel, Arno et Agnès Varda.
Dans un fauteuil roulant, un homme passe des journées à regarder dehors. Confiné forcé – victime d’un attentat (ce jour-là, quittant Madeleine qui dormait encore, il devait prendre un tram, puis le métro… Maelbeek) – il laisse son regard balayer la mer et le ciel, les brumes et les lumières (voir photo). Sauf qu’un mur surgit. Construit pour surélever d’un étage le casino proche. Et qui envahit peu à peu son champ de vision. «Le paysage, qui lui était familier jusqu’ici, disparaît». Brouillant du même coup ses souvenirs et ses sensations. Double peine, double enfermement.
Le récit se lit d’une traite. «Toussaint fait errer son narrateur immobile entre la vie et la mort, entre un passé qui recelait toutes les surprises parfois banales d’une existence, et un présent où tout semble s’effriter, où l’inquiétude sourd des murs...». Cette inquiétude à laquelle l’actualité sanitaire donne une étrangeté supplémentaire.
Infos:
En création mondiale, La disparition du paysage, de Jean-Philippe Toussaint, avec Denis Podalydès, dans une mise en scène d’Aurélien Bory, au TNL (194 route de Longwy, Luxembourg), le 30/03, le 31/03 et le 1er/04, à 20.00h, Infos et billetterie: www.tnl.lu
Littérature encore avec une révélation, à savoir: Laurent Petitmangin, né en 1965 en Lorraine «au sein d’une famille de cheminots» (voir portrait © Pascal Ito), accueilli par l’Institut Pierre Werner pour parler de son premier roman, Ce qu’il faut de nuit, paru en août 2020 (La Manufacture de livres) et récompensé dans la foulée par le prix Femina des lycéens. Dans cet ouvrage, âpre, «servi par un style sans fioritures» mais «tout en pudeur et retenue», l’auteur met en scène un père qui élève seul ses deux fils. Ceux-ci grandissent et commencent très tôt à prendre leur destin en main. «Une histoire de famille, de convictions, de choix et de sentiments ébranlés».
Laurent Petitmangin discutera avec Marie-Madeleine Rigopoulos, commissaire générale du salon «Le Livre sur la Place» de Nancy (lequel se tiendra du 10 au 12 septembre, 2021, si le ciel ne nous tombe pas sur la tête).
Infos:
Ça se passe le 9 avril, à 19.00h, à l’Institut Pierre Werner, 28 rue Münster, Luxembourg, infos tél.: 49.04.43-1, www.ipw.lu
Dansons maintenant…
Dans le même périmètre, soit: à Neimënster (Centre culturel abbaye de Neumünster), notez que la danseuse et chorégraphe luxembourgeoise Anne-Mareike Hess a démarré Through the wire (je vous en ai déjà parlé), une conversation en tête-à-tête, une rencontre téléphonique mais intime avec une personne installée dans la pénombre des salles voûtées, casque audio sur les oreilles, pour imaginer, par la voix, danser ensemble «par la seule force de l’imagination».
Infos:
Chaque session dure environ 50 à 60 minutes. Conversations en français, luxembourgeois, allemand ou en anglais. Le mardi 30/03, le mercredi 31/03 et le jeudi 1/04, chaque fois à 18.30h et 20.00h. Tarif: 9 euros. Inscription (tout public) obligatoire par tél.: 26.20.52 – 444 ou par e-mail: billetterie@neimenster.lu Sessions supplémentaires en octobre 2021.
Danse encore, mais à Bonnevoie, à la Banannefabrik, siège du TROIS C-L (Centre de création chorégraphique luxembourgeois) sis 12 rue du Puits, dans un énième dispositif pétri par la proximité et l’intimité, soit: Palimpsest, une nouvelle forme d’installation sonore géolocalisée qui, utilisant le langage de l’audiodescription, vous offre de découvrir le lieu de façon inédite… en compagnie de la danseuse et chorégraphe Léa Tirabasso.
Léa se souvient de chaque pièce/salle de la Banannefabrik, elle transpose ses expériences en mouvements, en lien avec chaque recoin du bâtiment, et grâce à votre smartphone et vos écouteurs, vous, visiteurs, une fois sur place, guidés par une application, «vous visualisez des figures physiquement absentes, mais que votre imagination vous laisse entrevoir».
Les prises de rendez-vous se font du lundi au vendredi, par créneaux de 30 minutes, de 10.00 à 16.30h.
Pour réserver gratuitement votre créneau, écrivez à danse@danse.lu en mentionnant le jour et l'horaire désirés.
A la Kufa, quoi de neuf?
Eh bien, pour succéder aux artistes pluridisciplinaires Sandy Flinto et Pierrick Grobéty (dont la sortie de résidence, ouverte au public, aura lieu en septembre), la Kulturfabrik d’Esch/ Alzette a décidé de soutenir et d’accompagner un artiste issu des musiques actuelles. En l’occurrence, il s’agit de Sacha Hanlet, auteur-compositeur, interprète, musicien et producteur, membre du groupe Mutiny on the Bounty depuis 17 ans, désormais promu «artiste-associé de la Kulturfabrik» jusqu’au 14 mars 2024.
Les détails de cette résidence seront dévoilés en juin, tout en sachant déjà que, durant trois ans, Sacha Hanlet bénéficiera d’un accompagnement humain et financier à long terme afin de développer son projet solo Them Lights, un savant mélange «avant-gardiste, sombre et groovy» de pop, d’électro et de r’n’b.
Sinon, la Kufa a invité deux photographes, Juana Valença et Paulo Lobo, à croiser leurs regards posés sur le lieu eschois entre novembre et février. «Ils ont fait le choix de l’improvisation libre en explorant espaces, matières et lumières, utilisant aussi bien l’argentique que le digital».
Et c’est le résultat de ce jeu de miroirs qui est présenté dans l'exposition Each Mirror Has Two Sides, les 1, 2 et 3 avril à la galerie Terres Rouges (photo ci-dessus).
Infos:
Afin de respecter les restrictions sanitaires, l’inscription au vernissage le 1er avril – rehaussé d'un DJ Ser by Paulinska, de 18.00 à 21.00h – est obligatoire (tout comme le port du masque). Les visites limitées à 10 personnes se feront par créneau de 30 minutes entre 18.00 et 21.00h. Inscription par mail à: mateusz @kulturfabrik.lu en précisant votre nom et le créneau horaire choisi.
Expo accessible le 2 avril de 14.00 à 21.00h, et le 3 avril de 16.00 à 21.00h. Visites limitées à 10 personnes, avec port obligatoire du masque. Infos: www.kulturfabrik.lu
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